’avais aidé le plus de personne que je pouvais et j’avais prit sur moi. Mon épaule me faisait vraiment souffrir le martyr. Je ne suis pas du genre à montrer ce sentiment en publique. J’étais donc parti m’isoler sur la plage. La pression moral était en train de redescendre. J’avais perdu un passager, mais c’était couru d’avance… Il avait une fracture ouverte et il devait probablement avoir une hémorragie interne. Sans soin hospitalier, c’était impossible pour lui d’avoir une chance de s’en sortir. Saleté de crash… De rage, et par reflex pour évacuer, je jeter un caillou de toute mes forces en direction de la mer.

« Putain de merde !!! »

J’avais non seulement évacuer toute ma colère et ma frustration, mais je venais aussi de me faire vraiment mal. J’avais déjà consulté pour mon problème. Le spécialiste m’avait dit qu’il pouvait m’opérer mais qu’il y avait un risque que je ne récupère pas en totalité. Sans compté la longueur de la rééducation. Donc, non merci … Je préférais encore me chouter aux médicaments plutôt que de passer sur le billard. J’essayais donc de ne pas le montrer du tout, mais là, je n’avais plus de médicaments et ça allait devenir compliqué...

Le crash avait eu lieu voilà seulement quelques heures, et tout un chacun avait mis la main à la patte pour aider. Avec mon fils Jordan, nous avions eu la chance d'être du côté de l'appareil qui s'était retrouvé dans l'eau, et avions pu accéder au canot de sauvetage gonflable, mais beaucoup de passagers avaient péri dans le choc et n'avaient pu s'extraire de l'avion avant qu'il ne coule. Avoir assisté à cela était horrible, mais il y avait aussi de nombreux blessés. Instinctivement, mon parcours en médecine chirurgicale m'avait permis d'aider nombre de passager, mais certaines avaient des lésions bien trop graves pour que je ne puisse faire quoi que ce soit. J"avais vu mourir une femme avec un sévère traumatisme crânien, et son mari en pleurs dans les bras de mon fils traumatisé était la vision la plus horrible que j'avais de cette journée.

Tout le monde semblait stabilisé à présent. Pour les survivants en tout cas. J'étais épuisée et je regardais autour de moi. Nous étions sur une plage, les gens étaient désemparés, pleuraient, appelaient, certains priaient même. Le coeur serré, je vis Jordan s'asseoir contre un palmier. Je vins vers  lui et il me déclara vouloir rester seul. Je n'avais aucune idée d'où se trouvait son père et je savais que cette question le taraudait. Je voulus cependant respecter son choix.

- OK, je vais marcher un peu, tu restes dans le coin, OK ? Ne va pas dans le bois derrière, on ne sait pas encore ce qui s'y trouve.

Puis, j'allai faire quelques pas sur la plage. Là, j'aperçus un homme qui lança rageusement une pierre dans l'eau. Je l'avais vu s'activer sérieusement pour aider des blessés lui aussi. Je me demandais s'il était médecin. Il serait judicieux de réunir tous ceux qui avaient une formation médicale, selon moi. Je m'avançai vers lui.

- Salut, je m'appelle Louise. Je vous ai vu prendre en charge des blessés tout à l'heure... Est-ce que vous êtes médecin aussi ?

Je m'aperçus cependant que son visage trahissait une certaine douleur. Je m'approchai un peu plus.

- Et vous, est-ce que quelqu'un s'est occupé de vous ? Vous êtes blessé ?

Bon sang, comment j’allais faire sans mes cachets? Non car je me doutais que l’on allait rester sur cette île un bon bout de temps… J’avais un peu de mal à rester positif… Je savais d’avance que ça allait mal tourner pour moi… Sans ma drogue, j’allais être de mauvaise humeur et vraiment peu fréquentable. Il allait donc falloir que je m’occupe le plus possible afin d’éviter de trop penser. Je m’étais occupé du plus de monde possible et j’avais vraiment fait tout ce que j’avais pu avec le peu de moyen dont je disposais. Je savais que certains allaient mourir et j’avais horreur de me sentir impuissant. Une voix attira mon attention et je me retournais.

« Bonjour… Je m’appelle Tony. Non, je suis pompier et vous? » Cette dernière vit tout de suite que quelque chose n’allait pas. « Personne ne peut rien faire… C’est une vieille blessure qui demande une opération et beaucoup de rééducation… Je suis sous cachets pour la douleur mais en vue de la situation, je vais devoir faire sans et je ne vous cache pas que ça va être vraiment compliqué sur le long terme… » Elle avait l’air vraiment gentille et attentionnée.

Je constatais avec soulagement, que cette dernière n’avait rien et c’était tant mieux. Elle avait eu de la chance tout comme moi. Je n’avais pas encore eu le temps d’explorer cette île, mais je me doutais que des choses dangereuses devaient s’y trouver. On allait devoir construire des abris pour les blesses et il ne fallait pas traîner. J’espérais que d’autres hommes non blessés seraient présents. On allait clairement avoir besoin de bras et on allait devoir faire vite. Les îles sont connues pour les pluies et les tempêtes. Mais pour le moment, le ciel semblait dégagé et rien de négatif ne s’annonçait.

Les émotions de tout un chacun étaient mises à rude épreuve avec ce crash. Personne n'aurait pensé un jour vivre cela. L'avion, le mode de transport le plus sûr au monde ? Bullshit !

J'avais été touchée par la solidarité des gens et de mon côté, j'avais fait au mieux de mes connaissances médicales pour aider et soigner un maximum de monde. J'étais rassurée de constater que d'autres avaient des bases de secourisme comme cet homme à qui je venais de me présenter. Tony, pompier. C'était parfait.

- J'ai eu mon doctorat d e médecine générale et j'étais en spécialisation chirurgie aux États-Unis, mais j'ai tout lâché pour suivre mon mari en Australie.

Chaque fois que j'y pensais, je me disais que c'était la pire décision de ma vie, surtout en voyant où m'avait menée ce mariage... Mais je songeais à mon fils qui était la plus belle chose qui me soit arrivé. Tony me parla de son épaule et de ses souffrances. Je hochai la tête.

- Je vois... La coiffe des rotateurs, n'est-ce pas ? C'est très douloureux, vous êtes courageux de tenir sans opération... Ou inconscient peut-être... Désolée, j'avais pas à dire ça. Toutes mes excuses Tony.

Je venais de réaliser que c'était peut-être inconvenant. Mais la fatigue et les émotions avaient tendance à retirer les filtres.

- C'est sûr que sans médicaments, vous allez douiller. Il faut espérer que les secours vont vite arriver. Il faudrait vous trouver des exercices pour échauffer votre articulation. Aviez-vous vu un kiné ?

Sans radiographie à l'appui, c'était difficile de savoir quoi lui conseiller.

Je n’avais pas vraiment prévu que quelqu’un surprenne ma petite crise de colère. Je savais très bien que je ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même sur ce coup-là. Le destin avait vraiment décidé de me donner une belle leçon afin de vraiment me faire comprendre que cette opération serait vraiment indispensable. Enfin, en théorie en tout cas, car pour être totalement honnête, je ne savais pas si on allait repartir de cette île en vie. J’allais donc devoir prendre sur moi et vivre avec… Bon sang, sans et sans médicament, ça allait vraiment devenir compliqué. Et encore plus avec mon caractère.

Je la regardais avec un air vraiment surpris. « Oh vraiment? » Elle avait vraiment gâché sa carrière pour son mari? Voilà une des raisons pour laquelle je ne me marierai jamais. C’est absolument hors de question que je laisse ma carrière pour une femme. Cette dernière va me suivre toute ma vie, les femmes, il y en a tout un tas dans le monde. Donc en ce qui me concernais, le choix serait vraiment très vite fait. J’éclatais de rire à la su ite de sa phrase. « Oh mais non, vous avez entièrement raison, je suis un peu inconscient sur ce coup. »

Je me passais une main dans les cheveux en soupirant. « Oui, on en a un qui venait tous les mois à la caserne pour s’occuper de nous. Mais disons que je n’en étais pas très fan… Il m’a donné des exercices et je les fais tous les jours. Mais c’est clair que ce n’est pas suffisant. Je sais que je ne peux m’en prendre qu’à moi et je sais que vous avez raison dans votre discours. C’est pour cette raison que je m’isole quand la douleur devient trop forte. Car elle a tendance à me rendre désagréable. C’est une très bonne analyse docteure. »

Je connaissais a peine ce gars, qui était un héros, ce fait ainsi que je voyais les pompiers, et voilà que j'avais l'air de le juger. Ce n'était pas le cas et j'espérais qu'il ne l'interpréterait pas ainsi. Mais heureusement, il se mit à rire. J'en fis de même, même si de mon côté c'était plutôt nerveux. Mais ça faisait du bien.

- Pardon, c'est un vieux réflexe, je crosi que ça ne me quittera jamais.

Docteur un jour, docteur toujours ? Quand je pensais à tout ce que j'avais abandonné pour suivre Hank. Tout ça pour finir en Australie avec un métier qui était loin de me passionner, et cocue en plus. Heureusement que j'avais Jordan. Je crois que c'était lui qui me permettait de tenir le coup, et je m'en voulais qu'il ait cette charge, même s'il n'en avait pas conscience.

J'échangeais quelques mots avec Tony à propos de son épaule. Je le souvenais avoir déjà assisté à l'opération qu'il aurait dû avoir depuis longtemps. C'était complexe car le muscle touché partait en plusieurs faisceaux, donc c'était long et délicat.

- Pas fan du kiné ? Pourquoi ça ? D'habitude les patients adorent les kiné.

Je me remettais à parler comme si j'étais encore aux États-Unis, interne en chirurgie. Comme ça me manquait. Je ne comprenais pas pourquoi mais être ici sur cette plage, post crash d'avion, faisait remonter ces souvenirs. Nous venions de vivre quelque chose d'extrêmement difficile, avion assisté à la mort de beaucoup de personnes, chose que jamais personne ne devrait avoir à vivre, j'étais d'ailleurs probablement veuve et Jordan orphelin de père à l'heure actuelle... Sans doute que toutes ces émotions faisaient ressortir cela.

- C'est une bonne idée oui, les exercices. Il faudrait trouver comment tenir votre épaule au chaud aussi. J'ai vu que certains faisaient des feux. Je pense que vous devriez dormir tout près. C'est quand le muscle se refroidit que la douleur revient plus fort.

Et ensuite ? Que devions-nous faire ? Y avait-il un mode d'emploi du bon naufragé ? Le soleil déclinait face à nous. Les secours viendraient-ils nous chercher ?

Je levais la main en souriant pour lui faire comprendre que je ne l’avais pas mal pris. Au fond, je savais très bien que cette dernière avait raison. Elle n’était pas la première à me dire tout ça. Mais j’étais têtu et je préférais subir que de me faire opérer. J’avais vu trop de cas où les patients perdaient une grosse partie de leur mobilité ou trop de cas où les patients restaient avec de lourdes séquelles et je ne voulais vraiment pas que ce soit mon cas. Je ne voulais pas mettre fin à ma carrière tout de suite.

« Mais non ne vous en faîtes pas pour ça. Je comprends très bien. En tant que pompier, j’ai parfois tendance à faire la même chose que vous. »

Elle embarqua ensuite sur le sujet du kiné. Le peu de séance que j’avais subi m’avait vraiment fait plus mal qu’autre chose. Je n’avais pas spécialement envie de recommencer tout ça. Sans compter que mon kiné avait été clair sur le fait que sans opération, mes douleurs allaient empirer. « Parce que la douleur est absolument atroce quand je sors de chez lui… C’est limites moins douloureux pour moi de ne pas y aller. »

« Je ne me permettrais pas de vous juger mais je trouve vraiment dommage que vous ayez tout lâcher. Vous auriez été un excellent médecin. Pourquoi vous n’avez pas reprit vos études une fois là-bas? Vous n’êtes pas obligée de me répondre si ma question est trop indiscrète. » Je ne voulais vraiment pas la mettre mal à l’aise mais elle avait vraiment l’air d’avoir de très grosses capacités et à ce niveau, c’était vraiment du talent gâché. Oui, j’avais déjà pensé à dormir proche du feu mais je laissais les personnes qui en avait le plus besoin en priorité.

« Oui je sais. C’est juste que je laisse surtout les personnes âgées ou frileuses y aller en priorité. Mais je vais essayer de mettre mon épaule au chaud avec ce que je trouverai. » Un bandage improviser pourrait peut-être faire l’affaire quand j’y réfléchissais. Le fait de lui parler m'aidait aussi à ne plus penser à la douleur.

C'était très bizarre de discuter, faire connaissance avec quelqu'un ausi calmement. Nous venions d'essuyer un crash, plus de la moitié des passagers de l'avion avait péri, une partie était blessée, et les survivants étaient traumatisés. Et nous, Tony et moi, nous parlions de nos vies. D'un autre côté, il nous fallait décompresser de tout cela. Cela me rappelait mes stages aux urgences, nous voyiions des cas extrêmement graves, puis une fois tout le monde traité, entre collègues nous discutions de choses tout à fait ordinaires.

Je permettais des conseils sur les soins à apporter sur l'épaule du pompier. Je trouvais dommage qu'il n'ait pas acceoté l'opération dans les temps. Dans ce genre de cas, plus on attendait et plus l'opération était délicate. Sa réaction face au kiné me fit sourire en coin.

- Si vous aviez mal, c'est simplement parce que votre corps avait besoin de ces soins. Vous avez l'impression de moins souffrir en ne faisant rien mais c'est parce que votre corps essaie de s'habituer à ce qui n'est pas normal. Mais tôt ou tard, cette anormalité va vous être plus nuisible encore. Le temps qu'on est ici, on va faire le maximum pour que vous alliez le mieux possible. Et puis je ne serais pas contre un bras droit pompier pour soigner les blessés.

Puis, à son tour il me posa des questions sur ma vie, mon passé. Un sourire triste naquit sur mes lèvres.

- Eh bien d'une part j'ai laissé passer plusieurs années sans études en suivant mon mari autour du monde pour son travail. L'avantage c'est que je parle plusieurs langues et je connais plusieurs sports de combat ainsi que la plongée. Je pensais d'ailleurs aller faire un tour dans l'épave pour récupérer des affaires nécessaires aux gens, le temps qu'on nous retrouve. Bref et ensuite on s'est installés en Australie, et étant américaine, ce ne sont pas les mêmes normes pour les études, et puis je suis tombée enceinte, nous avons eu Jordan. Quand il est allé à l'école, j'ai voulu travailler, mes beaux-parents ont proposé que je vienne travailler avec mon beau-père à son agence de voyage. Et voilà.

Je haussai es épaules ingénument. Ma vie ne ressemblait pas à ce que j'avais prévu mais c'était ainsi.

- Vous savez, on peut faire plusieurs feux.

J’écoutais cette femme sans l’écouter vraiment. Non, ce n’était pas un manque de respect, c’est juste que j’avais déjà entendu ce discours un nombre incalculable de fois. Mais je resté sur mes positions, il était absolument hors de question que je me fasse opérer. Je risquais d’avoir des séquelles et de perdre une grosse partie de ma mobilité. Je préférais souffrir et travailler que de devoir tout arrêter du jour au lendemain. Ma profession, s’était vraiment toute ma vie. J’en avais besoin et je ne me voyais vraiment pas faire autre chose. Sauver des gens, c’était la chose que je faisais le mieux.

« Oui, je sais déjà tout ça docteure. J’ai déjà entendu ce discours ainsi que toute la liste des choses que je risque si je décide de passer par la case opération. Le problème, c’est que je n’ai plus d’anti-douleurs et ça, ça va clairement devenir un problème. Je vais devoir gérer un état de manque et la douleur par-dessus le marcher. » Et ça, je n’avais vraiment pas hâte que ça arrive… Je ne pourrai pas forcément m’isoler car pour le moment, on ne connaissait pas cette île ni les dangers qui s’y trouvaient.

Je l’écoutais ensuite me raconter son histoire. Son mari était un bel abruti… Non mais franchement, il avait vraiment pensé qu’à sa gueule… Je ne savais pas où il se trouvait, mais j’espérais vraiment qu’il était très loin et que je ne le croiserai jamais. Car si ça devait arriver, il allait y avoir de fortes chances pour que je lui mette mon poing sur la figure en guise de bonjour. Je ne savais pas quoi dire à Louise car ce serait ridicule de lui dire, je suis désolée pour tout ça, elle n’avait pas d’autres choix que de faire avec de toute façon.

« Eh bien, je suis impressionné, vous avez d’incroyables ressources. Mais l’épave doit-être profonde et sans matériel de plongée, vous allez vraiment réussir à l’atteindre? Pour le feu on pourrait mais je préfère ne pas faire e surconsommation. Il doit y avoir plusieurs personnes qui ont besoin de dormir au coin d’un feu. Mais je veux bien vous aider à soigner les personnes qui en ont besoin avec ce que l’on a à notre disposition. »

J'avais toujours admiré les pompiers et l'abnégation dont ils faisaient preuve. Ce Tony avait l'air extrêmement concerné par son métier et j'étais peinée de le savoir dans une situation aussi fâcheuse de ses douleurs d'épaule non soignée et sans médicaments en plus.

- Oui, je me doute que vous avez déjà entendu tout ce que je vous dis... Excusez-moi, je voulais pas me la jouer rabat-joie.

Ce n'était pas le moment de se mettre quelqu'un à dos, surtout une personne qui pourrait s'avérer utile pour les autres. J'avais évoqué ma vie et je me rendais compte que c'était un sacré bordel. Et songer à Hank me fit réaliser que j'étais veuve. Il était mort dans ce foutu avion et c'était de ma faute... Oui, nous étions probablement sur le point de divorcer mais jamais je n'aurais souhaité sa mort. J'émis un soupir silencieux qui m'aida à ne pas fondre en larme avant d'évoquer mon projet de plongée pour récupérer des choses dans l'épave. Tony me fit remarquer que la profondeur pourrait être un obstacle. Je haussai les épaules.

- Si je n'essaie pas, je ne saurai jamais. Nous avons besoin de ressources, et vous avez vous aussi besoin de médicaments. D'ailleurs si vous voulez, demain matin, on pourrait essayer de dresser une liste des choses à trouver en priorité. Il faut occuper les gens pour éviter qu'il y ait des problèmes. Vous pourriez m'aider d'abord à vérifier que les blessés vont bien, et ensuite j'irai chercher l'épave.

J'étais déterminée car je savais que dans les bagages des passagers se trouvaient sans doute des tas de choses utiles qui nous serviraient le temps que les secours nous retrouvent.

Je ne connaissais pas Louise, en revanche, je savais qu’elle aurait fait un excellent médecin. Elle se souciait des autres et elle voulait me conseiller au mieux sur ce que je devrai faire pour mon épaule. Mais je savais déjà tout ça, cette dernière ne m’apprenait absolument rien. Sauf que je ne voulais absolument rien savoir. Il était absolument hors de question que je passe sur une table d’opération. La rééducation allait prendre un temps de fou et le chirurgien m’avait aussi dit qu’il serait possible que je ne retrouve pas toute la capacité de mon épaule. C’était quelque chose que je ne pouvais pas me permettre.

« Vous n’avez pas à vous excuser. C’est vraiment très gentil de votre part de vous soucier autant de mon épaule. Je connais les conséquences de ce que je fais et je sais que j’aurai toujours mal car je ne fais pas ce qu’il faut. Vous ne me connaissez pas mais vous constaterez que je suis un peu du genre têtu. »

Je lui faisais un sourire pour la rassurer et pour lui faire comprendre que je ne lui en voulais pas du tout. Louise semblait vraiment être une personne organisée qui était prête à tout pour aider les autres. Elle voulait plonger dans l’épave mais ce n’était pas une très bonne idée. En revanche, j’étais entièrement d’accord avec elle sur les autres points qu’elle avait mentionnés.

« Je suis entièrement d’accord avec vous. Mais plonger seule vers l’épave, je ne sais pas si c’est la chose la plus prudente à faire. En revanche, nous devrions aller chercher du bois pour le feu car la nuit va être fraîche et il faudrait aussi éloigner les animaux sauvages qui doivent vivre ici. J’ai ramené des valises mais je ne les ai pas encore ouvertes. Il faudrait essayer de chercher des couvertures mais je doute qu’on n’en trouve. »

Ce brave pompier me faisait de la peine, il souffrait et vivait un dilemme entre tenter de soigner son épaule mais prendre le risque de ne plus pouvoir exercer son métier, et ne rien faire et souffrir en travaillant. L'ennui, c'était qu'en faisant cela, il s'exposait aussi au risque de ne plus pouvoir travailler puisque si tout venait à se briser, ce serait sûrement irrattrapable à cause de l'usure des tissus. Mais il reconnaissait lui-même être du genre têtu, et après tout, c'était lui que cela regardait.

Nous échangeâmes à propos des choses à faire et il semblait d'accord avec moi sur certains points, mais pas tous. Il avait trouvé des valises et il faudrait faire l'inventaire du contenu.

- Je propose de trouver des personnes valides pour dresser cet inventaire. En effet, je doute qu'on trouve des couvertures dans les valises, ni même des vêtements chauds au vu de la destination et la provenance de notre avion, et je ne sais pas à quoi ressemblent les nuits sur cette île. Il nous faudra aviser. Mais pour les couvertures, je suis sure d'en trouver dans l'avion, il y en avait. Et vous savez, j'ai un certificat en plongée. De plus, je pourrais aussi trouver des trousses de secours et ça nous aiderait pour les soins de base dont certains ont besoin. On a un nouveau-né maintenant, aussi. Je veux mettre toutes les chances de notre côté. Si dans les valises vous trouvez un masque de plongée, ce serait le top. Des palmes encore plus. Mais sinon, je me débrouillerai.

Je lui adressai un sourire pour le rassurer. La nuit approchait à grand pas et il nous fallait rassurer les passagers.

- Allons voir ces valises alors, qu'est-ce que vous en dites ? Et trouver du bois, comme vous dites. Il faudrait donner des consignes comme ne pas s'éloigner. Il faudrait qu'on se compte aussi pour savoir combien nous sommes. Il faut trouver des vivres pour tout le monde. Je pense qu'on ne va pas manquer de noix de coco, dis-je en désignant les cocotiers qui longeaient la plage.

Une chose était certaine, cette femme avait des couilles en acier trempés. Je n’avais jamais connu une femme comme ça en dehors des forces de l’ordre. Mais elle avait raison, on devait arrêter de parler et passer à l’action. Cette dernière était très bien organisée. À la vue de son caractère, je me doutais que je ne pourrais pas la faire changer d’avis. Elle était vraiment déterminée. « Je suis d’accord avec ce point. Je vais trier les survivants et voir qui est capable de nous fournir de l’aide. Vous avez un certificat de plongée et je suis pompier. Vous n’êtes pas la seule à avoir ce genre de capacité. »

Mais ça ne servait à rien que l’on plonge tous les deux. Il fallait que l’un de nous reste sur place pour s’occuper des gens et ça ne me dérangeait pas de le faire. « J’en dis que vous avez tout à fait raison mais avant de commencer à chercher les valises, il faudrait d’abord s’occuper de trier les personnes par ordre de gravité. On va ensuite s’occuper des valises et pendant que vous irez plonger, je m’occuperai d’aller chercher du bois avec les personnes qui en sont capables. Mais il faut faire vite.»

Car en effet, la nuit n’allait pas tarder à tomber et je me doutais qu’il devait y avoir des animaux dangereux sur cette île. On n’avait pas d’armes et il fallait absolument éviter que l’on se fasse attaquer. On retournait donc rejoindre les survivants et on commençait à faire le tri. Heureusement, il n’y avait pas de blessé grave. Une fois que ce fut fait, on partait à la recherche des valises et je priais pour au moins trouver un masque de plongée pour Louise. Pour une fois, mes prières furent entendues. Je le prenais et je partais la voir.

« Louise! J’ai trouvé un masque regarde! »

J'étais contente de voir que Tony et moi étions sur la même longueur d'onde. Peu à peu, un plan d'action se mettait en place : trier les passager et les compter, voir qui avait besoin de surveillance, de soins constants, ceux qui étaient aptes à aider, et répartir les choses à faire. Donner les consignes de base aussi. Et aller fouiller les valises pour trouver des choses utiles. J'opinai du chef en souriant, voyant qu'il oubliait sa douleur pour se consacrer au plan.

- Parfait, c'est génial, faisons ça !

Nous nous levâmes et retournions auprès des gens. Je commençai un comptage d'un côté en évaluant aussi ceux qui semblaient assez forts pour donner un coup de main. Puis j'entendis la voix de Tony qui m'interpelait. Je retounai vers lui.

- Waow ça c'est génial ! Dès demain matin, je plonge chercher l'épave. J'ai compté sept personnes de ce côté, je leur ai demandé de ne pas bouger pour ne pas fausser notre comptage. Parmi eux, deux sont aptes à donner un coup de main. Les autres sont trop jeune sou fragiles ou avec des petites blessures, je préfère ne pas risquer d'infection pour une noix de coco.

J'attendais que de son côté il me fasse son rapport.

- Si tu veux, je continue d'évaluer les besoins de soins et toi tu peux partir chercher du bois et des vivres ? Essayer de ne pas vous éloigner trop. Il faudrait établir un périmètre. Ce serait con de se perdre dans la jungle.

Je jetai un oeil à Jordan qui discutait tranquillement. Au moins, il devenait sociable.

- Je vais leur demander de se regrouper, et je vais essayer de faire une sorte d'infirmerie provisoire pour avoir tous les blessés au même endroit. J'aurais juste besoin d'aide pour les porter avant que tu ne partes à tes recherches.